HISTOIRE DE L'INSTITUTION SAINT-JACQUES
HAZEBROUCK ENTRE 1893 et 1993
d'après le livre de Roger
Renou:"Une
histoire centenaire"
années 1930-1945-
l'abbé OMEZ-5°supérieur-l'abbé Decoopman 6° supérieur
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1930-1945
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M. L’ABBE OMEZ
CINQUIÈME SUPÉRIEUR 1930-1935
M. l’Abbé WYCKAERT, supérieur
depuis 1920, promu curé de la paroisse de Steenwerck en septembre 1930, quitte
ses fonctions. Mgr le Cardinal LIENART, Evêque de Lille, désigne pour lui
succéder M. l’Abbé Jean OMEZ
professeur au Sacré-Coeur à
Tourcoing. Dans son allocution lors de sa prise de fonction, M. l’Abbé OMEZ
déclarait:
« Je vous remercie tous des paroles aimables que vous m’avez adressées, je suis ravi de ce premier contact. Si j’avais connu Saint-Jacques et Hazebrouck sous le jour où je le vois aujourd’hui, je n’aurais trouvé aucune objection à faire lors de ma nomination ; et d’ailleurs, toutes mes appréhensions du début, assez naturelles devant une charge aussi inattendue, sont déjà dissipées, il me plaît d’entrevoir l’avenir de Saint-Jacques sous les meilleurs auspices. J’ambitionne d’avoir une maison joyeuse autant que laborieuse ; une famille nombreuse aussi, où toute la jeunesse de la Flandre, se donnant rendez-vous, trouverait une formation intellectuelle, morale et religieuse parfaite ». |
L’INSTITUTION SAINT JACQUES DE
1930 A 1935
M. l’Abbé OMEZ
venait
de TOURCOING, Supérieur à Saint Jacques en 1930, décédé en 1952.
Malgré la récession des années
trente, la situation financière de l’Institution était satisfaisante. M. l’Abbé
Deroo , judicieux gestionnaire, Econome de l’Institution et trésorier de la
société civile avait su faire en sorte qu’il en soit ainsi, permettant au
nouveau Supérieur d’envisager l’avenir avec sérénité. Le 13 octobre
1930, Mme Caboche mit en vente sa maison, située au N° 34 rue de l’orphelinat
et attenante au jardin de l’Institution, au prix de 20.000 francs. M. le
Supérieur n’hésita pas un seul instant, et en accord avec M. le Directeur de
la société civile s’en porta acquéreur : « Celle-ci
conviendrait, disait-il, pour loger les professeurs ». Ce fut là son
premier acte de Supérieur quinze jours après sa prise de fonction.
Ensuite il se chargea d’équiper
l’Institution « d’outils nécessaires », comme il se plaisait à
le dire, en aménageant une infirmerie, en faisant installer le téléphone, en
achetant une automobile, un appareil de projection et du matériel de polycopie.
Dès 1931, M. le Supérieur décida d’améliorer les conditions de vie et d’hygiène des pensionnaires. Il fit installer des lavabos et des vestiaires dans les dortoirs, et des WC aux étages, construire un garage à vélos pour les externes. Il fit aussi refaire toutes les peintures intérieures de l’internat, de la chapelle, et de la salle des fêtes qui avait été construite avant la guerre et qui du fait de la guerre et de l’après- guerre, n’avait jamais reçu sa décoration intérieure ; ce qui fut fait cette année-là. Le décor était particulièrement superbe, les filets d’aluminium produisaient un effet décoratif admirable, et la frise supérieure qui va rejoindre chacun des anciens luminaires fixés au mur latéral s’harmonisait de façon parfaite au damier si joli qui remplaçait l’ancienne cimaise.
Outre les travaux importants, on renouvela complètement tous les grillages protecteurs des portes et des fenêtres donnant dans la cour de récréation. Ces grillages étaient en tôle découpée et formaient de petits losanges en accordéon. "C’est à la fois gracieux et solide, mais surtout cela sert de protection des vitres contre les jets de ballon."
A la fin de 1934, tout avait été remis à neuf. Saint-Jacques, établissement scolaire, n’avait plus simplement des locaux propres et hygiéniques, blanchis à la chaux, comme c’était l’usage jadis, mais possédait désormais des locaux dont les murs étaient recouverts de carreaux en céramiques et des salles plus agréables, plus modernes, où la décoration restait sobre, mais adaptée au goût du moment, plus artistique et plus riante. Cette dépense qui avait été décidée par M. le Supérieur et M. l’Econome n’avait qu’un but : offrir une maison plus accueillante aux pensionnaires et à leurs familles ; ce ne fut pas là une réclame de mauvais aloi ;"car si l’on pouvait dire du collège Saint-Jacques qu’on y était bien nourri et qu’il y faisait très propre, son recrutement était pleinement assuré".
LES SCOUTS DE SAINT JACQUES
La troupe scout de Saint Jacques
fut fondée le 18 avril 1926 par les Abbés GOEMMINNE et CORTYL,
professeurs à Saint-Jacques :
"LA TROUPE SAINT-JACQUES 1ère
HAZEBROUCK". Elle se composait de trois patrouilles, et d’une
meute. Celle-ci dépendait du collège, mais avait à sa création son local au
château Vandamme, rue de Cassel à Hazebrouck.
Pour la première fois, le 7
juillet 1932, à l’occasion de la "journée Scout" à Saint-Jacques,
plusieurs chefs de patrouilles et scouts firent leur promesse au Collège dans
un cérémonial qui ressemblait à une intronisation. Par la suite, ces
cérémonies eurent lieu régulièrement chaque année au collège, où les
scouts avaient élu domicile.
Un premier local servant de salle
de travail et de réunion avait été mis à leur disposition près de la
lingerie.
M. le Supérieur fut très
honoré qu’il y eût une troupe scout sous le patronage de l’Institution. En
1935 il décida de faire construire un local pour la troupe. Celui-ci était
adossé aux ateliers Fournier, avec une sortie principale sur la petite cour et
une sortie secondaire sur le jardin. Ce local fut hélas détruit pendant la
seconde guerre mondiale, puis reconstruit au même endroit. Il est aujourd’hui
surnommé "L’OASIS", lieu de rencontre bien connu des
élèves, et qui sert essentiellement à la catéchèse.
LES TRADITIONS ET LES RÈGLES DE VIE A SAINT- JACQUES PENDANT LES ANNÉES 30
Certaines traditions et règles de vie avaient été instaurées au fil des années par les prédécesseurs de M. le Supérieur OMEZ et celui-ci s’était engagé à les maintenir, les faire revivre, ou à en créer de nouvelles.
*Il y avait ce que l’on appelait
« la retraite de rentrée » celle-ci durait cinq jours et
était prêchée par un prédicateur extérieur.
*La fête de la Saint- Nicolas,
au cours de laquelle les petites classes organisaient et offraient une soirée
récréative aux plus grands, une pièce de théâtre par exemple "la
vengeance de Croque-mitaine" et toute séance se terminait par une
quête de charité.
*L’arbre de Noël
se fêtait avec la présence des familles et les élèves jouaient les pièces
préparées pendant l’année scolaire.
*Au vacances de Pâques, M. le
Supérieur, accompagné d’un Abbé professeur et des élèves volontaires,
partait en pèlerinage à Lourdes. Le premier eut lieu le 1er avril 1934.
*La fête de Sainte- Jeanne d’Arc,
elle, se célébrait tous les ans le 18 avril depuis la béatification le 18
avril 1909. On y mêlait la commémoration historique avec les élèves
costumés comme au temps de Jeanne, la signification religieuse par la
participation à une messe solennelle et les joies profondes : jeux,
crêpes et feu d’artifice...
*Tous les 24 juin se déroulait la
fête des maîtres, avec une grand' messe,
un repas en commun, et l’après
midi, divers
concours, une "foire aux plaisirs", et une vente de
charité.
*Le 14 juillet était baptisé
"journée du purgatoire". Cette journée était consacrée aux
retenues pour examens insuffisants.Les devoirs de vacances se
faisaient au collège du 8 août au 9 septembre, sauf les lundi.
Chaque année, un groupe d’élèves
encadrés par leur professeur, participaient à la
procession de la
Fête-Dieu qui avait lieu en ville ; à cette occasion, ils revêtaient
l’habit du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle : la pèlerine ornée
de ses coquilles, le galérus (chapeau à large bords) également orné de la
coquille, chacun tenant à la main un bourdon (bâton) surmonté de la gourde.
Les internes
restaient à Saint-Jacques le dimanche et ne rentraient chez eux qu’aux
vacances.
Le dimanche se déroulait ainsi : après le réveil et la toilette, prière du matin, travaux d’entretien, puis la grand' messe à la chapelle, le repas, ensuite promenade en ville encadrée par les professeurs. A 16 heures retour à Saint-Jacques pour le goûter, puis à 16 heures 30 les vêpres ; détente jusqu’à 18 heures, puis dîner, études à 19 heures jusqu’à 20 heures ; enfin prière du soir, montée au dortoir, toilette du soir et coucher à 21 heures.
En semaine, la participation à la messe basse de 7 heures 25 était obligatoire, les élèves qui souhaitaient recevoir la communion devaient y assister à jeun.
Pendant le mois de mai, mois de Marie, le chapelet était obligatoire pour les petites divisions, chaque jour à la récréation de 16 heures et à 20 heures avant la montée au dortoir. Pour terminer il y avait une retraite de fin d’étude pour les plus grands, pendant trois jours au Mont des Cats.
Photo:La
communion solennelle en 1936; l'uniforme a changé.Les élèves portent en plus
le brassard de communiant.
M. L’ABBE DECOOPMAN SIXIÈME
SUPÉRIEUR
(1935 - 1945)
M. l’Abbé OMEZ , dut quitter la direction de Saint-Jacques pour des raisons
de santé en août 1935. Mgr le Cardinal Liénart, Evêque de Lille, désigna M.
l’Abbé Rémi DECOOPMAN, pour prendre la direction de Saint-Jacques,
maison qu’il connaissait bien pour y être entré comme professeur d’Anglais
en 1916 et ne jamais l’avoir quitté depuis.
M. Rémi DECOOPMAN est né à Steenvoorde le 1 mai 1887. Ordonné prêtre à Saint-Saulve le 6 juillet 1913. Professeur à N-D. de Grâce à Cambrai en 1913. Vicaire à Cassel en 1914, puis à Steenvoorde en 1915. Professeur à Saint-Jacques en 1916. Supérieur à Saint-Jacques en 1935. Supérieur honoraire et professeur à Saint-Jacques en 1945. Il se retire à Hazebrouck, y décède en 1971, à l’âge de 84 ans. M. l’Abbé DECOOPMAN était un personnage hors du commun, très estimé, jovial, toujours d’humeur égale. Ses amis lorsqu’ils parlaient de lui entre eux le surnommaient avec gentillesse "COOPJE"
L’INSTITUTION SAINT JACQUES DE
1935 A 1940
M. l’Abbé
DECOOPMAN,
connaissait parfaitement l’Institution, et avec son ami l’Abbé DEROO,
Econome depuis 15 années, il formait un tandem parfait. L’établissement
venait d’être retapé à neuf, le succès de Saint-Jacques s’affirmait de
plus en plus grâce aux résultats obtenus par les élèves aux examens, mais il
fallait bien innover.
Ce fut d’abord la création d’une nouvelle infirmerie
à trois chambres. Puis M. le Supérieur pensa que pour le bien être des
élèves il fallait développer le
sport. Il apprit en 1936 que la pâture
jouxtant l’Institution serait à vendre. Il en informa aussitôt le président
de la société civile afin de l’acquérir car il voyait là le futur stade de
Saint-Jacques.
Mais le propriétaire en voulait beaucoup d’argent car des
promoteurs s’y intéressaient également. La société, ne pouvant réunir la
somme nécessaire à l’acquisition ferme, proposa de traiter avec le
propriétaire afin d’en obtenir la jouissance par un bail emphytéotique.
Quoiqu’il n’approuvât pas cette proposition, il fit la promesse de ne pas
vendre aux promoteurs. L’affaire de la pâture en resta là, mais un espoir
subsistait.
LE
RÈGLEMENT INTÉRIEUR DES ANNÉES TRENTE
Le règlement intérieur de cette époque se résumait en quatre mots qui
définissaient l’esprit de la maison :
«PIETE, TRAVAIL, DISCIPLINE
& GAIETE», et l’on
pouvait lire :
La «PIETE» est mise en première place dans notre collège chrétien, où il s’agit d’abord de former les coeurs de nos élèves. Les exercices de piété sont classés en deux catégories, ceux obligatoires et ceux facultatifs Les exercices obligatoires comprennent :
Les exercices facultatifs comprennent :
Le «TRAVAIL» pour rendre le travail plus intense. On excite l’émulation des élèves, on renseigne les parents par des notes, on a recours à des sanctions.
La «DISCIPLINE» : les élèves doivent se montrer obéissants et respectueux vis à vis de leurs maîtres, vis à vis de leurs camarades. Ils sont tenus de pratiquer les règles de la charité et de la politesse, et vis-à-vis d’eux-mêmes, avoir le souci constant de propreté, d’ordre et de bonne tenue.
La «GAIETE» une des conditions permettant de créer une atmosphère de bonne humeur et d’entrain qui rendra plus facile l’obéissance et plus fructueux le travail.
CONSIGNES PARTICULIÈRES AU RÈGLEMENT Les internes qui habitent Hazebrouck et qui ont obtenu plus de 28 en note de conduite peuvent, sur la demande des parents, déjeuner chez eux le dimanche ; mais ils reviennent pour les vêpres. Au réfectoire, les élèves parleront à mi voix et jamais en Flamand. Des promenades seront organisées les jeudis et dimanches ; pour les sorties dominicales les élèves iront gantés et auront le pardessus boutonné en ville; ils se déplaceront en rangs par trois et seront encadrés par leurs professeurs ; pour les sorties officielles du collège, tous les élèves doivent revêtir l’uniforme avec les gants noirs et porter la casquette d’uniforme dans la rue, ils éviteront de parler haut, de s’entretenir de choses mauvaises ou légères. Communications des internes avec l’extérieur : elles se font sous contrôle de M. le Supérieur, les lettres écrites par les internes doivent être remises ouvertes, sauf si elles sont adressées à un prêtre, les lettres qu’ils reçoivent leur sont remises ouvertes, toute correspondance clandestine doit être considérée comme un cas de renvoi du collège. Tous les livres introduits au collège doivent porter la signature d’un professeur, les autres seront confisqués. Il est interdit d’introduire des journaux ou revues de sport, l’introduction clandestine de livres, journaux , images, mauvais ou légers, expose le coupable à être honteusement chassé.
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DES ANNÉES DIFFICILES POUR L’INSTITUTION
1937 fut une année où des difficultés financières commencèrent à apparaître : la hausse des prix du pain , du beurre et du charbon eurent une influence néfaste sur le budget de l’Institution. En conséquence, le prix de la pension passa de 1.500 francs par an à 1.000 francs par trimestre, les prix de la demi-pension et de l’externat subirent les mêmes effets. Cette hausse des prix n’entraîna pas de défection dans les effectifs scolaires : à la rentrée d’octobre 1938, on put inscrire 208 élèves, dont 116 pensionnaires, parmi lesquels de jeunes Belges.
D’importantes réparations durent être effectuées en 1939. A la suite de la chute d’un chapiteau de la chapelle, on constata que le bois de toutes les sablières était usé et il fallut soutenir artificiellement chaque ogive, de même que la toiture, par des échafaudages intérieurs et remplacer le bois par du ciment. Les mêmes dégâts furent découverts sous les pignons espagnols des fenêtres du dortoir de la Vierge. Ce travail fut effectué pendant les grandes vacances, et le coût des réparations mit bien mal en point la situation financière de l’Institution.
M. le Supérieur fut très
affecté par cette situation et il ne se cachait pas de dire entre amis
« ces
réparations nous ont trahi, la pâture que je convoitais tant à coté de chez
nous, s’éloigne ainsi, cette idée est presque sortie du domaine de mes
espérances. L’affaire est dans une impasse financière ».
La conjoncture internationale n’était pas bonne non plus, et risquait d’entraîner notre pays dans un conflit d’une ampleur insoupçonnée. Saint-Jacques souffrait déjà de l’état de guerre par la mobilisation de sept de ses professeurs, et sur les 124 internes inscrits, 60 seulement se présentèrent à la rentrée. Les externes étaient à peu prés au complet.
Mais M. le Supérieur réorganisa immédiatement son budget pour faire face à cette situation et avec quelques concours de professeurs extérieurs, l’Institution put fonctionner de façon presque satisfaisante. Mais la carence des pensionnaires aggrava encore la situation financière.
SAINT JACQUES PENDANT LA GUERRE
1940 - 1945
L’offensive allemande des mois
de mai et juin 1940 fut terrible pour Saint-Jacques qui eut à subir les
premiers bombardements aériens. L’Institution était dans un état de
désolation : toute la toiture des cuisines était arrachée, la charpente
fracassée, le mur de façade à hauteur du dortoir enfoncé par des obus, son
plancher criblé d’éclats, le plafond du dortoir abattu, la chapelle blessée
au flanc par un énorme trou d’obus, sa toiture gravement endommagée, sa
voûte également criblée d’éclats à donner l’idée d’une écumoire
renversée, sans compter les vitraux entièrement détruits.
D’autre part,
pendant cette année 1940, suite à la débâcle des troupes françaises et
alliées, il y eut un passage à Saint-Jacques de milliers de soldats s’arrêtant
pour y passer la nuit puis repartir vers les arrières. Quelque temps plus tard
ce fut un mouvement inverse effectué par des milliers de prisonniers de guerre
emmenés vers les camps allemands qui y firent étape. Les locaux étaient dans
un piteux état, pleins de paille pulvérisée, mêlée au plâtras effondré et
aux débris de toute sorte.
A partir du milieu de l’été
1940, la situation fut plus calme et M. l’Econome l’Abbé DEROO
reprenant son courage à deux mains. Malgré la situation, il trouva des
maçons, des couvreurs, et des manoeuvres.
Puis il entreprit les travaux les
plus urgents avant l’hiver : la toiture de la cuisine et de la chapelle
fut réparée pour que la maison fût, au moins dans le sens vertical, au sec.
Saint-Jacques était redevenu viable, les travaux étaient tellement importants,
et longs, que M. le Supérieur n’eut pas le temps de prévoir la rentrée d’octobre
1940. D’autre part la mobilisation d’autres professeurs, les abbés DEVOS,
BOUCHERIE, SAINT-OMER, semblait rendre impossible le fonctionnement du collège.
Une solution fut heureusement trouvée par l’autorité diocésaine, à savoir la fusion de Saint-François et de Saint-Jacques, chaque maison faisant apport de son personnel enseignant non mobilisé et de ses élèves à enseigner. Cette décision fut bien accueillie et la rentrée fut décidée pour le 10 octobre 1940 : il y eut 12 pensionnaires et 80 externes, un nombre à peu près égal dans chaque institution.
Le 22 juin 1941 , Saint-Jacques subit le premier bombardement aérien depuis l’armistice. Le 25 juin, un deuxième bombardement, heureusement sans être touché. Les 26 et 27 juin au matin M. le supérieur, conscient du danger, décide un départ anticipé des élèves pour un congé dont la durée dépendrait des événements. 3 juillet, troisième bombardement qui atteint cette fois le collège de plein fouet, une bombe frappe l’aile gauche et explose dans la grande salle, celle-ci s’écroule à moitié, une deuxième bombe atteint le bâtiment de façade, traverse toute la superstructure et vient se loger sous le dallage du réfectoire, mais heureusement n’y explose pas. "Ce phénomène s’était déjà produit au même endroit en 1918, fallait-il croire au miracle car pour l’instant Saint-Jacques ne dénombre aucune victime à la satisfaction de tous". Ce dernier bombardement de l’année 1941 termina l’année scolaire.
CRÉATION DE L’ASSOCIATION
SPORTIVE DE SAINT JACQUES
Malgré les effets démoralisants de cette guerre, M. le supérieur avait gardé
toutes ses ambitions et notamment celle du sport, il reprit contact avec la
société "le Froment", propriétaire de la pâture
jouxtant l’établissement,
et lui proposa à nouveau de louer celle-ci pour la somme de 10. 000 francs par
an. C’était la guerre, les temps étaient durs, et devant cette offre le
propriétaire accepta et signa un bail de neuf ans. M. le Supérieur du Petit
Séminaire voyant alors du haut de sa fenêtre les jeunes élèves de
Saint-Jacques s’ébattre sur leur terrain de sport et attristé de ne pouvoir
offrir ce moyen de détente à ses jeunes séminaristes, il demanda au
Supérieur de l’Institution Saint-Jacques son accord pour partager l’utilisation
de ce terrain de sport moyennant une contribution de 50% du montant de la
location, ce dernier accepta, la bonne entente de voisinage étant de rigueur
par ces temps difficiles de la guerre.
Il ne tarda pas que le terrain de football fut tracé, et les équipes constituées. Passionné par le sport, le 17 décembre 1941, M. le Supérieur fut le premier à effectuer les démarches pour la création de l’association sportive de Saint Jacques. Mais le pays étant sous l’occupation Allemande, sa demande dut être également transmise dans la langue de Goethe.
La rentrée d’octobre 1941 se fit pour la première fois avec un seul pensionnaire, celui-ci ayant insisté pour être admis. Les mêmes dispositions furent prises qu’à la rentrée de 1940, c’est-à-dire mixité entre Saint-François et Saint-Jacques. Le nombre d’externes était sensiblement le même, mais étant donné le nombre extrêmement faible d’élèves, Saint-Jacques vivotait financièrement et "mangeait de l’argent" comme le rappelait M. l’économe, impuissant dans ses regrets.
Le 23 octobre 1941, lors de la réunion annuelle de la société civile, M. le Supérieur annonça qu’il venait d’apprendre la mort de M. DEGROOTE membre assidu de la société depuis 1910, très apprécié, décédé en exode, et que personne du Collège ne pourrait assister à ses obsèques.
L’année 1942 fut plutôt calme en événements, et l’espoir renaissait. M. le Supérieur disait alors
« Vous remarquerez que même les situations extraordinaires ont leurs répétitions. Le calme de l’été, sans justifier d’une propagande fructueuse, a permis du moins une rentrée meilleure que la précédente, le Collège compte sept pensionnaires cette fois avec la promesse d’un huitième, ce n’est pas encore la famille nombreuse, mais nous serons moins seuls. Si seulement ce nombre nécessairement encore restreint, pouvait présager une prompte reprise. . . Elle viendra sans doute, mais ne peut se prévoir avant la fin de la guerre, même passive où nous nous trouvons. Nous avons été relativement tranquilles ces derniers mois, mais la menace est toujours là ». |
Les réparations essentielles des
bâtiments, gravement endommagés par les bombardements de juin et juillet 1941,
mirent une fois de plus l’Institution dans une situation financière
difficile. M. l’économe fut chargé de constituer un dossier de demande de
participation de l’Etat aux frais de reconstruction.
L’année 1943 débuta mal car les troupes allemandes envahirent
progressivement les deux ailes de l’établissement, puis les dépendances du
côté des cuisines, puis une salle des dépendances du côté de la petite
cour, puis deux, puis la salle des scouts, puis la cuisine elle-même, mais en
cohabitation. Seule la chapelle ne fut pas occupée. Malgré une défense pied
à pied , le collège, du moins ce qu’il en restait, se trouvait refoulé dans
le bâtiment de façade. Dans cette façade, il fallait loger, outre les
professeurs, quinze pensionnaires, une paire de domestiques, et surtout y créer
des salles de classe, qui, même si elles
n'étaient pas très fournies en élèves malgré l’appoint de ceux de
Saint-François, étaient tout de même ouvertes en totalité, depuis la classe
de Philosophie jusqu’à la dixième incluse.
Les effectifs étaient sensiblement les mêmes que l’année précédente, quatorze pensionnaires et quarante externes. Mais Saint-Jacques était toujours situé dans une zone dangereuse, exposée aux actions militaires, à en juger d’après les derniers bombardements aériens. Des informations laissaient même prévoir qu’il pourrait être tenu pour plus exposé que précédemment. Était-ce une tentative de propagande de l’ennemi allemand ? Toujours est-il qu’aucune sérénité, aucune confiance de la part des professeurs ou même des élèves présents, aucune allusion à la cave aménagée solidement en abri ne prévalait contre l’épouvantail de la menace toujours suspendue; « l’éloquence aérienne est une autre mesure et d’une autre efficacité.» (Abbé DECOOPMAN)
Lors de la réunion annuelle de la société civile, le 23 octobre 1943, dans l’exposé de la situation financière, M. le Supérieur prit la parole et avec une certaine gravité déclara :
« Il devient même illusoire - il le paraît du moins - de songer autrement que dans l’avenir à d’autres réparations que celles qui présentent un caractère conservatoire : toitures, portes, fenêtres, carreaux. D’ailleurs, en l’absence d’indemnités, les finances de l’établissement ne supporteraient pas les dépenses. Toute notre consolation est de continuer à exister, de n’avoir pas à déplorer jusqu’ici de pertes humaines ou d’accidents de personnes. Le Collège garde la vie en attendant des jours meilleurs, la vie et l’espoir et l’espoir fait vivre! »
M. l’Econome, avec une nuance d’ironie, déclara ensuite qu'il ne soumettrait pas ces Messieurs de la société à une rude épreuve, car le bilan de cette année évoluait dans les nombres de première grandeur, plutôt simples et qu’il serait malheureusement un économe presque rentier, s’il n’y avait les tickets de ravitaillement à comptabiliser.
1944 fut l’année la plus douloureuse de ce siècle d’existence. Saint-Jacques sortait d’un cauchemar, d’une exécution presque capitale, l’aile gauche, l’aile droite, la salle des fêtes, le local des scouts, la cour, tout était détruit. Dans un long document historique, M. l’Abbé DECOOPMAN,supérieur, fit le récit de ce que fut le bombardement du 24 juin 1944 qui acheva l’Institution.
Le 24 juin 1944, fut le bombardement qui frappa Saint-Jacques dans ses oeuvres vives, qui faillit l’abattre, dont il se ressentira longtemps. Dans la soirée, soudain, un vrombissement puissant donna l’alerte; sans autre avertissement, l’allure, la tournure, la direction des bombardiers déclencha chez tous une véritable panique : professeurs, élèves, domestiques, pour tous le réflexe fut de bondir à la cave. Nous y étions à peine, et même pas tous encore qu’un fracas épouvantable nous assourdit, nous stupéfia de peur instinctive et d’horreur. Les murs semblaient osciller, élastiques, mais ils tenaient bon; on haletait sans un cri. Une première vague passée, il en vint une seconde, puis une troisième, puis je ne sais combien encore. Ce qu’il y avait de terrible, c’est qu’on ne les entendait pas seulement, mais qu’on les sentait pour ainsi dire descendre, on sentait qu’ils allaient jeter, on rentrait la tête dans les épaules... et ils jetaient en effet. Peu à peu on s’habituait à cet exercice, sans s’y familiariser. Nous avions l’impression et nous disions les uns aux autres que la maison avait été touchée cette fois ; le vacarme des portes, fenêtres, tuiles, carreaux avait été un indice assez clair. Mais nous nous figurions que seulement deux ou trois bombes étaient tombées sur les bâtiments ou aux abords immédiats. Quand l’attaque prit fin, que le bruit de la formation des bombardiers s’éloigna, que l’on osa sortir de la cave, un spectacle dantesque nous attendait, inimaginé, affolant, apocalyptique, les deux ailes du bâtiment étaient abattues, des pignons jusqu’aux trois quarts, plus une seule porte n’était sur leurs gonds, plus de tuiles sur les toitures, plus une seule vitre, partout en tous sens, dans un tohu-bohu indescriptible des planches, des dalles de pierres, des branches. Plus de la moitié des arbres de la grande cour étaient abattus, plusieurs avaient totalement disparu, l’un d’eux planté tête la première, les racines seules sortaient du sol. De la cour à la rue Warein il y avait une quinzaine de cratères. La terre argileuse rejetée en blocs gigantesques atteignait la hauteur des fenêtres du premier étage, et formait un remblai contre les murailles. Le spectacle était à première vue effarant, démoralisant. Que faire ? On aurait renoncé à la tâche, même sans songer au prochain bombardement toujours possible. Le soir même, on ne put que déblayer un peu les passages indispensables, et créer quelques pistes. Le lendemain matin, remis de nos émotions, mais heureux d’être tous là bien vivants sans aucun blessé , on fit le tour complet de l’établissement et du terrain, on déplora que le jardin qui était en si belle forme la veille fût complètement sacrifié, les légumes avaient été soufflés plus une seule trace de culture, notre belle chapelle n’était plus qu’un amas de pierre. Puis, dans un sursaut d’énergie et d’espoir, toute la communauté de Saint-Jacques valide, manches retroussées, se mit à l’ouvrage, on rajusta tant bien que mal portes et fenêtres, on aveugla les ouvertures béantes à l’aide de morceaux de tôle, de contre-plaqué, de carton, de toile enfin tout ce que l’on pouvait avoir sous la main. Les tuiles qui n’étaient pas cassées furent remontées en place grosso modo; on reporta celles qui restaient de la grande salle sur le bâtiment central. Quand on fut à peu près au sec, puis comme l’accalmie aérienne se prolongeait et que les nouvelles de la guerre laissaient à penser qu’une issue était proche, on appela une équipe de plafonniers de la maison Lapouille vers la mi-août; en même temps que les menuisiers Debreu, ils remirent d’abord en état provisoire le plafond du dortoir de la Vierge, car nous avions l’intention d’y transférer la chapelle devenue inutilisable. Le six septembre 1944, ce fut la libération, les sollicitations des nombreux parents d’élèves évoquant déjà la rentrée d’octobre, nous donnèrent une autre orientation à ce projet. Et malgré l’état des lieux nous allâmes jusqu’à envisager une rentrée en octobre. Nous pensions accepter cinquante pensionnaires, soixante peut-être, enfin tout ce que nous permettrait la capacité du dortoir de la Vierge et le mobilier ad hoc qui nous avait en partie été volé. Certains de ceux à qui nous
faisions timidement part de ce projet nous trouvaient bien audacieux,
téméraires même, d’envisager une rentrée en octobre, dans des conditions
aussi peu confortables. Mais ils ne nous découragèrent pas pour autant, c’étaient
les mêmes qui nous avaient trouvés pusillanimes de renoncer à la propagande
active pendant les années de bombardements ! Il y a depuis la libération, une poussée générale, une ruée vers les pensions. Nous n’en sommes pas moins heureux que l’Institution Saint-Jacques retrouve et même au-delà, ses cadres, ses effectifs normaux , en attendant qu’elle retrouve sa belle figure d’avant la guerre et de saluer avec toute la communauté sa réviviscence. »
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M. L’ABBE DECOOPMAN QUITTE SES
FONCTIONS
En septembre 1945, M. le
Supérieur quitte ses fonctions, après avoir passé dix années à diriger l’institution.
Il se retire avec autant de simplicité qu’il y est entré, « n’ayant
pas démérité », il demande à garder son poste de professeur, ce qu’on
lui accorde bien volontiers. Infatigable, il enseignera encore une dizaine d’années
environ. Après s’être effacé, il sera nommé Chanoine honoraire de N-D. de
la Treille, il décédera à Hazebrouck le 10 janvier 1971.
M. l’Abbé DESWARTE avait plaisir à dire, en parlant de M. le Chanoine
DECOOPMAN, que c’était un homme comme on en voit peu « Puisse-t-on
longtemps garder son souvenir ».
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